Quelle est la meilleure méthode d’apprentissage

Apprendre prend du temps. On investit temps, énergie, argent, parfois même beaucoup d’argent. L’issue de l’apprentissage est incertaine, face à la difficulté le doute peut s’installer. Vais-je y arriver ? Alors commençons-nous à réfléchir. Ma manière d’apprendre est-elle optimale ? Existe-t-il une meilleure approche ? Ne suis-je pas en train de perdre mon temps ? Alors comment apprendre ?

Fort heureusement les études empiriques ont démonté l’existence d’une technique d’apprentissage redoutable quelle que soit votre type d’intelligence. Ce n’est pas la panacée, ce n’est pas magique, cette approche est difficile, frustrante, elle demande rigueur et honnêteté intellectuelle. Pour peu que l’on accepte de payer ce prix, on s’ouvre à une vision qui surclasse toutes les autres : c’est la technique de la récupération associée au test systématique.

Que l’on soit lycéen, étudiant ou professionnel, l’exercice de la récupération mémorielle d’une connaissance est la clé pour apprendre, pour créer des modèles mentaux robustes, pour maîtriser la matière que vous souhaitez apprendre.

Le retrieval, ou récupération en français, est la plus efficace des méthodes pour mémoriser à long-terme. Je l’ai moi-même employée dans mon apprentissage de la programmation. J’ai vu des résultats dès les premiers jours.

Cela fait des dizaines d’années que les psychologues et spécialistes en sciences cognitives étudient les processus d’étude, les différentes techniques d’apprentissages et le fonctionnement du cerveau.

L’évolution de la neurologie et les preuves empiriques le démontrent : le retrieval, le fait « d’invoquer » la connaissance de mémoire est la meilleure manière d’apprendre et de retenir sur le long terme.

Pourquoi apprendre sur le long terme ? Tout simplement parce’que c’est l’essence même de l’expertise. Les études de la plasticité cérébrale ont démontré que le cerveau des experts est à jamais modifié par leur maîtrise.

Un expert n’est jamais qu’une personne ayant construit une modélisation mentale avancée de son domaine. La maîtrise nait de notre capacité à innover, à cesser de suivre les règles. Le modèle mental, fondement de la maîtrise, est une forme de compétence profondément ancrée dans notre cerveau aux multiples liaisons neuronales : il nous permet d’appliquer une connaissance dans des contextes divers.

Comme une roche de bord de mer, altérée petit à petit par le reflux des vagues, notre cerveau est modifié à chaque récupération mémorielle. Apprendre efficacement, apprendre à long-terme permet de faire évoluer notre cerveau, de construire notre expertise future et la meilleure approche pour cela est la récupération.

La plupart des sites pour apprendre  traitent de cette méthodologie. Apprendre à mieux lire, apprendre à parler anglais, apprendre une nouvelle technique : la récupération est applicable à tous les sujets.

Que l’on soit lycéen, étudiant ou professionnel, c’est une nécessité d’apprendre perpétuellement. Pour les débutants, pour réviser, pour créer des modèles mentaux robustes ou pour maîtriser la matière que vous souhaitez apprendre : l’exercice de la récupération mémorielle d’une connaissance est clé. C’est le meilleur moyen pour apprendre.

Qu’en est-il des autres méthodes d’apprentissage ?

Les formes d’apprentissage classiques, lecture, relecture et prise de notes de manière intensive paraissent être les plus efficaces. Pareil pour l’éducation, nous pensons que l’enseignement classique, la présentation du cours puis la pratique d’exercice est la meilleure technique. Il n’en est rien. Ces pratiques classiques mènent même à des illusions de maîtrise que nous aborderons ultérieurement. La récupération corrige les problématiques des autres formes d’éducation et les études empiriques démontrent son efficacité et sa large supériorité face aux autres méthodes d’apprentissage.

En fait, l’efficacité du retrieval est directement liée au fonctionnement intrinsèque de nos neurones et de leurs procédures d’enracinement des nouvelles informations.

Je vais faire simple. Si vous souhaitez avoir une compréhension plus globale je vous conseille de vous référer à mon article à ce sujet.

Plus les liens seront nombreux, plus nous aurons cartographié la connaissance et plus elle sera ancrée et plus facile sera la récupération mémorielle.

Notre cerveau reçoit l’information depuis nos sens, ensuite il l’encode et la stocke dans la mémoire à court terme : la mémoire de travail. Ici la mémoire disparaît à moins que nous ne la consolidions. La consolider nous pousse à réutiliser l’information encodée. Comment le cerveau fait-il ? Il va la rechercher, il va remonter les liaisons neuronales jusqu’à récupérer l’information nécessaire. La récupération lance systématiquement cette procédure. C’est là toute la force de la récupération par rapport aux autres méthodes d’apprentissage : elle active tout le temps la procédure de consolidation, elle permet de perfectionner la connaissance.

Pendant cette phase de consolidation l’information est à nouveau malléable. Nous pouvons créer de nouveaux liens neuronaux avec d’autres connaissances. À chaque processus de reconsolidation, à chaque pratique du retrieval, nous créons de nouveaux liens. Plus les liens seront nombreux, plus nous aurons cartographié la connaissance et plus elle sera ancrée et plus facile sera la récupération mémorielle. L’incidence est une meilleure mémorisation. Voilà pourquoi le retrieval est la meilleure approche.

Voici pourquoi les applications d’apprentissage des langues comme Babbel ou Duolingo ne sont pas optimales : elles n’emploient pas systématiquement la récupération. C’est un bon point de départ mais ce n’est clairement pas la voie la plus efficace.

Préparer au retrieval : la conceptualisation de la connaissance

Je vous l’ai dit, une connaissance doit être cartographiée. J’aime ce terme car il illustre très bien le concept de modèles mentaux. Quand nous apprenons, quand notre cerveau consolide la connaissance, cela a pour effet de créer des liaisons neuronales. Ces liaisons créent une structure mentale. Voici notre manière d’apprendre. Nous créons des modèles mentaux, nous créons des structures mentales de connaissance.

Bien que le retrieval aide à élaborer ces structures mentales il a surtout pour effet de les consolider. Les fondations de ces structures comme celles d’un immeuble doivent être bien établies et leur ciment est la compréhension.

Pour conceptualiser la connaissance, pour créer des liaisons mentales optimales, pour lier la nouvelle structure avec le reste de votre connaissance vous devez d’abord la comprendre.

Développez vos capacités de compréhension : la récupération à travers Feynman ?

  1. Accordez-vous du temps : comprendre peut être long, en particulier les sujets complexes. Pour cela vous devez accepter la procédure, vous soumettre à la difficulté et passer du temps sur un problème. Si vous essayez vraiment de comprendre mais que vous ne comprenez pas et que vous allez voir une solution, vous aurez préparé les liaisons neuronales en passant du temps à essayer. Votre modélisation, votre rétention de l’information future n’en sera que meilleure.
  2. Essayez de re-démontrer ce que vous essayez de comprendre. Comprendre c’est avant tout comprendre l’intégration de la connaissance dans son univers, dans son domaine. Essayer de re-démontrer, de suivre la procédure qu’ont suivi les découvreurs permet de contextualiser la connaissance. Vous renforcez votre modélisation en la réintégrant avec sa source.
  3. Utilisez des exemples. Il existe deux types d’apprenants. Ceux qui apprennent par le théorème et ceux qui apprennent par l’exemple. Prendre un exemple concret voire plusieurs exemples concrets et remonter vers la règle générale peut également être un excellent moyen de comprendre. C’est comme ça que j’apprends. Dans vos exemples essayez d’identifier les similarités, les différences, les règles essentielles, remontez jusqu’à la règle générale en partant du cas particulier.

La force de la technique Feynman c’est qu’elle reprend les traits de chacun de ces points. Servez-vous-en énormément et adaptez-la à votre manière de fonctionner. La méthode Feynman est l’exemple même d’une pratique de la récupération pour mieux comprendre. Elle s’emploie pendant et après les exercices pour mesurer sa compréhension. Cette mesure réalisée de tête vous force à sortir la connaissance de votre esprit, à la mettre en ordre, elle renforce votre compréhension du sujet en l’ordonnant. Désormais, voyons plus précisément pourquoi la récupération fonctionne.

Pourquoi la récupération est-elle la meilleure méthode d’apprentissage ?

La pratique de la récupération renforce la consolidation naturelle de la connaissance, nous l’avons vu. Là n’est pas sa seule force. La récupération est redoutable car elle tue l’illusion de maîtrise et appuie le paradoxe de l’apprentissage.

Le fléau de l’étudiant : l’illusion de la connaissance

Quand on apprend, en particulier quand on utilise les approches classiques de l’apprentissage, prise de notes, relecture, « stabilotage », on entre très rapidement dans une illusion cognitive puissante appelée l’aisance cognitive.

Ce procédé automatique est activé lorsque l’on est dans un état d’aisance, lorsque le monde autour de nous est facile. Nous aimons l’aisance cognitive, elle est reposante et rassurante. C’est la familiarité de notre environnement, la répétition, l’habitude qui la créée.

Il y a une différence entre connaître le nom de quelque chose et connaître quelque chose. – Richard Feynman

Malheureusement, les approches classiques, la répétition intensive et massée et la relecture rendent la matière familière. Nous entrons très facilement dans un état d’aisance cognitive. Cette impression de simplicité nous donne une puissante illusion de connaissance : comme tout est familier, nous croyons que nous savons alors qu’il n’en est rien. Comme le disait M Feynman, il y a une différence entre connaître le nom de quelque chose et connaître quelque chose.

Connaissez-vous l’effet Dunning-Krüger ? Cet effet découvert par les psychologiques Dunning et Krüger dit que moins nous en savons sur un sujet plus nous avons tendance à surestimer nos compétences réelles. L’effet Dunning-Krüger est le résultat direct de l’illusion de connaissance.

La récupération vient tuer cette illusion, elle révèle nos failles et notre manque de compréhension du sujet. En nous demandant de résoudre un problème ou d’expliquer nos connaissances, toute ambiguïté se dissipe : soit nous savons le faire, soit nous ne savons pas.

Mettez en valeur vos lacunes

Les psychologues Robert Sternberg et Elena Grigorenko sont allés plus loin et ont vu le test, la récupération comme un moyen d’identifier ses lacunes.

C’est le dynamic testing, une branche de la technique de récupération qui cherche à adopter une approche itérative. Le dynamic testing c’est mettre en place des tests systématiques dans votre processus d’apprentissage. Le développement d’une expertise, l’acquisition de connaissance à long-terme est un processus sans fin. Suivre une telle procédure vous permet de vous situer sur l’échelle de l’expertise, de passer d’un niveau inférieur à un niveau supérieur en identifiants vos lacunes via des feedbacks rapides.

Comment le mettre en place ? D’abord, identifiez les tests les plus à mêmes de représenter votre niveau de mémorisation et de connaissance, écrire un mémoire, répondre à des questions, faire des quizz. Insérer ces tests très régulièrement et relevez vos lacunes. Ensuite, retournez à l’apprentissage et concentrez-vous sur ces lacunes. Testez-vous à nouveau et ainsi de suite pour favoriser la mémorisation.

Les vertus de la difficulté

La technique de la récupération a aussi pour effet d’employer le paradoxe de l’apprentissage. J’ai également écrit un article à ce propos, jetez-y un œil si vous souhaitez creuser le sujet.

Que dit le paradoxe de l’apprentissage ? Plus le sujet est difficile, moins nous comprenons, moins nous arrivons à résoudre un problème, meilleure sera notre compréhension finale et notre mémorisation à long terme. Ici se trouve la force de la récupération. Non seulement cette technique nous permet de briser l’illusion de connaissance, de mettre en valeur nos lacunes, mais elle permet aussi d’intégrer de la difficulté dans notre apprentissage : cette difficulté permet d’apprendre rapidement car elle seule indique un apprentissage.

La difficulté est inconfortable, mais doit être recherchée. Rappelez-vous, une connaissance maîtrisée, une information apprise sur le long terme est consolidée maintes fois. La compréhension difficile impose de passer du temps, l’incapacité à résoudre des problèmes pousse à réfléchir : toute épreuve difficile prépare à l’impression des liaisons neuronales et toute liaison issue de la difficulté, toute liaison née dans l’effort est puissante.

Un bon apprentissage est frustrant, un bon apprentissage est difficile. Il n’y a pas d’autres issues : soumettez-vous à l’apprentissage, employez la méthode de la récupération. Paradoxalement, c’est la difficulté qui vous permettra d’apprendre facilement.

La meilleure technique d’apprentissage : les différentes formes de test

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J’aime l’expression « épreuve du baccalauréat ». Un apprentissage optimal est une épreuve. Seule l’épreuve permet d’apprendre. Ne pensez pas qu’il soit possible d’apprendre en regardant ou d’apprendre en écoutant.

C’est l’erreur, la correction de l’erreur et ce procédé systématique qui est au centre de la technique de la récupération et qui agit sur la consolidation de la mémoire. Toute pratique que nous mettons en place est là pour éprouver notre capacité à aller chercher la connaissance. Le test est la clé de voûte de la récupération.

Testons pour comprendre, testons pour apprendre et testons pour mesurer.

Instaurez un système de test systématique

Dans Mets-Toi Ça dans la Tête, les auteurs nous présentent la force du test. Une mémorisation à long terme, la construction d’une expertise repose sur la capacité à invoquer la connaissance quand vous en avez besoin. Reconnaître la réponse et être capable de la recracher de mémoire n’est pas la même chose. Pouvoir l’invoquer de mémoire est l’essence même de l’expertise et pour cela il faut s’y entraîner. C’est en forgeant que l’on devient forgeron n’est-ce pas ?

Et pourtant, les études empiriques menées dans l’Université Publique de Columbia prouvent que même de simples quizz, en début et en fin de chaque cours, améliorent les résultats des étudiants.

Quand on se teste, quand on restitue la connaissance de mémoire nous renforçons les liens neuronaux. Même si l’on échoue. Quand on ne parvient pas à restituer la connaissance, nous apprenons quand même, nous créons les sillons des liaisons cérébrales futures.

Le test est un bon moyen d’apprendre. Même en début d’apprentissage, avant même d’être exposé à la connaissance, le fait d’essayer de trouver la solution prépare les futures liaisons neuronales. Après avoir été exposé, l’acte du test re-consolide les liaisons.

Voici une nouvelle façon d’apprendre. Cessons de lire et de relire : testons-nous. Testons systématiquement et à tout moment. Testons pour comprendre, testons pour apprendre et testons pour mesurer.

Tester sa compréhension : se tester pendant l’apprentissage

Quittez les techniques de l’éducation traditionnelle. N’attendez pas la fin d’un cours pour pratiquer. Pendant que vous apprenez, pendant que vous lisez et vous vous découvrez la connaissance, posez-vous régulièrement des questions, commencez déjà à vous tester : Qu’est-ce que je viens de voir ? Quelles sont les idées clés ? Quelles sont les idées que je ne connaissais pas déjà ? Comment pourrais-je réexpliquer cela ? Comment ces idées s’intègrent-elles dans ce que je connais déjà ?

Ces questions vous poussent à élaborer les bases de vos futures structures mentales. C’est un très bon moyen pour apprendre. Quand je lis des livres je me les pose très souvent. Cela me permet de pratiquer la récupération pendant la découverte du texte et de consolider la connaissance actuelle et future.

Le test est un excellent moyen d’apprendre. Quand on comprend le fonctionnement du cerveau et la force du test, nous pouvons apprendre très rapidement.

Simulez le réel dans votre méthode d’apprentissage : la pratique directe

Posez-vous cette question : pourquoi souhaitez-vous apprendre cette connaissance ? Pour un examen ? Pour trouver un emploi ? Pour votre culture générale ? Cette question vous permet de définir un usage final. Cet usage vous permet de construire votre système de test.

Dans vos tests essayez de simuler la situation réelle de l’application de la connaissance. En doctorat par exemple, écrivez des mini-essais ou mini-mémoires. Si vous souhaitez devenir développeur et apprendre les concepts de programmation sur le long terme, essayez de coder des projets concrets. Simulez au maximum la condition réelle.

Dans chaque connaissance il y a plusieurs aspects. Savoir appliquer un théorème mathématique et savoir quand l’appliquer n’est pas la même chose. Savoir coder des parties de logiciels et savoir construire un projet n’est pas la même chose. Savoir répondre à des questions dans un examen et savoir expliquer une connaissance n’est pas la même chose.

En vous testant avant, pendant et après l’apprentissage vous créez des liaisons neuronales solides. En projetant la connaissance dans son application réelle, vous la rendez plus plastique. Vous créez des liaisons avec d’autres compétences. Tout ceci renforce vos structures mentales et vous permet de retenir votre connaissance sur le long terme et de construire une expertise redoutable.

Identifier des exercices pratiques

Je ne dis pas qu’il faut abandonner les exercices pratiques et répétés classiques. Simplement, utilisez la pratique directe pour rendre la connaissance plus plastique et pour identifier certains manques.

On le sait, dans l’apprentissage d’une nouvelle langue, rien n’est mieux que d’aller faire un séjour linguistique. Vous réalisez une pratique directe. En parallèle, identifiez vos lacunes et identifiez des exercices à pratiquer. Toujours dans l’idée des tests, pouvez-vous en créer pour apprendre de nouveaux mots ? Pouvez-vous créer des tests pour la prononciation ? Pouvez-vous identifier un système pour apprendre le vocabulaire ? Pareillement, vous pouvez apprendre à lire plus rapidement en lisant tout simplement mais vous pouvez adopter des exercices pratiques en utilisant un guide de lecture, en vous attaquant à des textes plus complexes.

C’est l’identification de vos besoins d’apprentissage précis, la pratique directe associée au test intense et répété qui vous permettront d’apprendre le plus possible. Cependant, un test trop intensif et trop souvent répété n’est peut être pas la meilleure pratique pour apprendre.

Pour mémoriser, espacez la pratique

Connaissez-vous la courbe de l’oubli ? Mise au point par le psychologue Ebbinghaus, cette courbe illustre l’oubli dans le temps.

N’évitez pas l’oubli. À l’inverse, cherchez à oublier pour augmenter la difficulté de la récupération.

La courbe de l’oubli est un outil puissant, une bonne aide à apprendre qui devient redoutable quand on l’associe au paradoxe de l’apprentissage. Quand on commence à désirer la difficulté, la courbe de l’oubli prend un sens nouveau.

Elle vous permet de créer une difficulté artificielle en espaçant les tests. Nous ne devons pas espacer nos tests pour éviter d’oublier mais pour créer un calendrier de retour à la difficulté.

En adoptant la répétition espacée, vous vous permettez d’oublier. En vous permettant d’oublier vous permettez à la difficulté d’être systématiquement présente.

Quand la difficulté décroit, quand chaque test devient plus facile, n’hésitez pas à augmenter la durée de l’espacement. Commencez une fois par jour. Quand ça devient facile passez à une répétition par semaine puis une fois par mois et ainsi de suite. Ces chiffres sont arbitraires, choisissez des délais qui vous conviennent.

N’évitez pas l’oubli. À l’inverse, cherchez à oublier pour augmenter la difficulté de la récupération.

Variez la pratique

Quand on apprend, on a tendance à se concentrer exclusivement sur la connaissance ciblée. On travaille des heures durant, répétant encore et encore. Cette répétition provoque l’illusion de connaissance. Pour dissiper l’illusion vous pouvez entrelacer les sujets : les auteurs de Mets Toi Ça Dans La Tête nous invitent à mélanger les exercices et les matières.

N’hésitez pas à varier la pratique, à apprendre plusieurs choses à la fois. Changez le type d’exercice, passez du quizz au mini-essai ou à la construction d’un projet concret. Cela aura pour effet de renforcer votre connaissance de la matière mais aussi d’accroître votre capacité à appliquer la connaissance dans différents contextes.

Pour expliquer cela, je vais me prendre en exemple. Pendant que j’apprenais à coder, j’apprenais un langage de programmation : le JavaScript. En programmation il existe des principes généraux directement liés à la logique informatique qui ne dépendent pas du langage employé. Algorithmie, data structures, logique de programmation. De nombreuses compétences et connaissances viennent s’ajouter à la simple maîtrise d’un langage.

Auparavant, je me concentrais exclusivement sur le JavaScript et je cherchais à développer mes compétences dans ce langage. Après avoir lu Mets-Toi Ça Dans La Tête, j’ai décidé d’adopter l’entrelacement. Je continuais à apprendre le JavaScript pour apprendre d’autres choses : déployer un projet sur un serveur, gérer les versions du code, comprendre les fonctionnalités intrinsèques du langage. Des compétences directement liées au métier que je veux faire. Je souhaitais aussi développer ma logique de programmation. En parallèle, j’ai donc fait des exercices d’algorithmie et de data structures non pas en JavaScript mais en C, un langage dit de bas-niveau, assez complexe.

Pourquoi ai-je fait ça ? L’entrelacement rendait mon retour au JavaScript toujours un peu difficile ce qui me forçait à réintégrer les concepts déjà vus. Aussi, comme le C est totalement différent du JavaScript et même plus difficile dans sa syntaxe, j’apprenais à déployer des algorithmes pour des data structures dans un contexte plus rigoureux.

Ça n’a jamais été aussi difficile et frustrant mais je n’ai jamais autant progressé. Je ne peux que vous conseiller d’essayer par vous-même et d’adapter ce que j’ai fait à la matière que vous travaillez en ce moment.

Améliorez votre modélisation de la connaissance

Vous pouvez aussi adopter la technique de l’élaboration. Cette technique consiste à pratiquer la récupération dans le but de créer de nouvelles liaisons avec d’autres connaissances. Comment faire ? L’approche la plus connue de l’élaboration est l’enseignement.

Plus on est capable de lier une connaissance avec ce que l’on sait déjà, meilleure en sera notre compréhension et plus nombreuses seront nos liaisons neuronales pour retrouver la connaissance au moment opportun.

Quand vous enseignez, vous êtes obligés de recracher la connaissance, de la comprendre dans sa globalité pour aider au mieux les autres. Vous devez aussi apprendre ce que la connaissance n’est pas. Quand on enseigne, nous devons être capables d’expliquer pourquoi les choses fonctionnent ainsi et pas autrement. Nous devons être capables de différencier les matières. Les techniques d’apprentissage reposant sur l’élaboration vous permettent d’apprendre des autres en expliquant, pour eux et pour soi.

Entre apprenants, enseignez-vous les uns les autres ou pratiquez cela à l’écrit pour vous-même : dans ce dernier cas c’est la méthode Feynman. Vous pouvez aussi essayer de trouver de nouveaux exemples illustrant au mieux la connaissance. Ce travail d’illustration de la matière vous force à en reconnaître les points clés, vous créez de nouvelles liaisons neuronales en liant la connaissance à de nouveaux contextes. Essayez de trouver des métaphores, des analogies.

L’apprentissage ne se limite pas à l’acte d’apprendre. Quand vous parlez avec d’autres, quand vous leur expliquez ce que vous êtes en train de travailler, vous pratiquez sans cesse la récupération.

En fait l’idée de l’élaboration est de renforcer votre représentation mentale de la matière. Plus on est capable de lier une connaissance avec ce que l’on sait déjà, meilleure en sera notre compréhension et plus nombreuses seront nos liaisons neuronales pour retrouver la connaissance au moment opportun. Les nouveaux liens construits vous aide à apprendre.

Résolvez vos problèmes avant d’avoir la connaissance nécessaire

Ce procédé s’appelle la génération. C’est le fait d’essayer de comprendre, d’essayer de résoudre un problème, de détailler ce que l’on va découvrir avant d’être exposé à la matière.

La découverte de la génération a remis en question l’éducation traditionnelle. Il est plus intéressant de pratiquer avant d’être exposé à un cours.

Quand vous suivez cette méthodologie, vous faites le travail d’un chercheur, vous déduisez l’information. Vous aurez surement tort mais le simple fait d’essayer avant d’avoir été exposé crée de solides sillons préparant les futures liaisons neuronales. Vous commencez déjà à modéliser la connaissance dans votre esprit.

Vous pouvez pratiquer le « generative learning » de multiples façons. Vous pouvez tenter de deviner ce que vous allez trouver dans la connaissance, de résoudre le problème ou d’expliquer à l’écrit en quoi consiste la matière avant d’avoir été exposé au cours.

Pourquoi je ne parle pas des moyens mnémotechniques ?

Les moyens mnémotechniques sont redoutables quand on veut commencer à apprendre. Ils permettent de retenir assez facilement l’information dans un délai très court. Ce n’est pas le but de l’éducation ou de la construction de l’expertise.

Nous voulons mémoriser sur le long-terme, ancrer si profondément la connaissance dans notre esprit par la pratique répétée et l’instauration de difficulté que nous ne pouvons plus l’oublier.

Les moyens mnémotechniques sont à l’opposé. C’est une approche qui a pour but de rendre l’apprentissage facile pour répondre à un besoin précis à un moment précis. Je ferai un article à ce sujet prochainement.

Cette méthode d’apprentissage à un prix

La récupération fut pour moi une révélation. Si j’ai n’ai jamais été un excellent élève au lycée, je pense maintenant être un étudiant efficace. La récupération a considérablement changé ma manière d’apprendre et j’ai vu une claire amélioration en l’appliquant.

En revanche, le prix de cette technique peut être lourd à supporter. Si l’on applique la récupération avec la plus grande honnêteté intellectuelle, nous tuons notre aisance cognitive. Nous entrons dans une phase de vérité permanente sur nos capacités actuelles. Au départ cette approche est douloureuse. Nous commençons très rapidement à remettre en cause notre intelligence. Nous brisons toutes les illusions qui nous protègent de la réalité.

Il est impératif pour quiconque voulant suivre cette voie saisisse l’importance du Growth Mindset. Nos capacités intellectuelles sont en partie héréditaire mais la plasticité de notre cerveau nous permet d’évoluer.

La psychologue Carol Dweck a vu une différence de résultats entre les personnes se soumettant à l’apprentissage et à l’erreur contre celles cherchant à prouver leur valeur. Ces derniers apprennent moins vite. Quand nous sommes dans cet état d’esprit, nous avons à cœur de protéger notre égo, nous n’embrassons pas la difficulté, nous ne pouvons pas utiliser paradoxe de l’apprentissage.

Si vous désirez tester cette méthode, pour votre santé mentale et pour l’efficacité de votre apprentissage vous devez adopter le Growth Mindset, vous devez comprendre que la difficulté et la frustration sont normales. Ce n’est pas vous qui avez un problème, c’est votre stade de connaissance et de compréhension actuelle.

Le cerveau est un outil formidable, capable d’évoluer et d’inventer. Faites confiance à l’apprentissage, faites confiance à vos capacités naturelles d’évolution, faites confiance au plus merveilleux organe que la nature nous a offert : soumettez-vous à l’apprentissage.

Acceptez la frustration, acceptez l’échec, acceptez l’incompréhension et dites-vous bien qu’un temps arrivera pour réussir. Rien n’est plus jouissif que le moment où nous comprenons, le moment ou la matière devient limpide : cela vaut toute la frustration du monde.

La récupération : technique la plus redoutable pour mémoriser à long terme et développer son expertise.

La technique de la récupération, du test perpétuel simule la vie réelle. Dans la vraie vie, quand vous travaillez, vous passez votre temps à tester vos connaissances.

Chaque fois qu’un architecte doit dessiner un bâtiment, il ré-invoque le savoir qu’il a acquis au fil du temps. Après plusieurs années, il a appris l’application de sa connaissance dans de multiples contextes. À chaque fois que vous allez pratiquer une langue dans le réel vous préciser la connaissance.

Suivre une recette de cuisine est facile, savoir comment réagir quand la recette se passe mal ou quand nous manquons d’ingrédients est plus difficile. L’un est la méthode du débutant, la seconde, la méthode de l’expert or on dit d’un expert qu’il a appris par l’expérience.

Là réside la plus grande force de la récupération. En tuant l’illusion de connaissance, en utilisant le paradoxe de l’apprentissage et en testant perpétuellement, nous nous rapprochons d’une connaissance par l’expérience, d’une modélisation mentale poussée : nous apprenons comme les maîtres ont appris.

Alors maintenant, à chaque fois que vous souhaitez développer de nouvelles compétences, apprendre une langue étrangère ou tout simplement réviser : penser à la récupération car paradoxalement, c’est la difficulté qu’elle induit qui nous mène à apprendre plus facilement.

Photo © Fredy Jacob

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